Prédication du Dimanche 10 décembre 2000

 

Leçons spirituelles du premier Temple

I Chronique 22. 7 à 10 + Aggée 5. 21 à 24 + Jean 2.18 à 22

 

Avez-vous déjà remarqué combien nous pouvons être oublieux de certaines choses ? Quelqu’un nous rend service, nous nous promettons de le remercier, nous voulons lui offrir un petit cadeau... et puis le temps passe, le train-train nous reprend, et nous nous réveillons 6 mois plus tard estimant qu’il est trop tard pour bien faire, Il en va de même parfois avec des excuses que nous devons présenter à quelqu’un mais, au fil du temps, nous oublions. L’enfer est pavé de bonnes intentions jamais réalisées...

Je suppose que c’est un peu le même phénomène qui s’est passé en Israël Le peuple était sorti d’Egypte, avait vaincu le désert et occupait son pays. Lorsque Dieu avait donné des ordres pour la construction du Tabernacle, il était clair que celui-ci n’était qu’une tente temporaire. Il était évident que la volonté de Dieu était que le peuple, une fois installé dans son pays, construise une maison pour Dieu. Mais alors que tous les membres du peuple sont bien installés, Dieu n’a pas de temple. Et cela n’est pas qu’un détail. En effet, sous l’ancienne alliance, Dieu avait choisi de démontrer sa présence au milieu de son peuple élu par la manifestation de sa gloire dans un lieu défini. Que faire si ce lieu n’existe pas ? Et puisque le lieu n’existe pas, n’est-ce pas déjà un aveu du peu d’intérêt porté à la présence de Dieu au milieu du peuple?

C’est David, homme selon le cœur de Dieu, qui va prendre conscience de cela. Tout à coup il réalise que lui, le roi mis en place par Dieu, vit dans un palais mais que son Dieu n’a même pas un lieu symbole de sa présence au milieu du peuple. Cela lui apparaît comme intolérable et David décide donc de construire le Temple de Dieu sur le modèle du Tabernacle. Mais Dieu va l’arrêter, voulant donner un message clair son peuple. Et c’est Salomon qui sera chargé de présider à la construction du Temple.

Cette histoire de la construction du Temple me semble révéler certaines vérités spirituelles. J’en relève trois ce matin.

1- Le Temple de Dieu doit être une maison de paix.

C’est parce que le Temple doit être une maison de paix que sa construction est confiée à Salomon, pas à David. Certes David était un homme selon le cœur de Dieu mais Dieu a estimé que, du fait de son implication dans de nombreux combats, David n’était pas l’homme qu’il fallait pour construire le Temple. Et cela se comprend. David peut être le type de la royauté de Dieu, de sa souveraineté et de son jugement sur ceux qui s’opposent à lui. Mais le Temple présente une autre facette de l’action de Dieu envers nous : la grâce.

Car le Temple est symbole de la grâce de Dieu. Qui aurait pu imaginer que l’Eternel, ce Dieu qui n’habite pas dans des temples fait de la main des hommes, ce Dieu terrible qui ne supporte pas la vue du pécheur, accepterait d’être ainsi en quelque sorte " localisé" au milieu des hommes. Voilà Dieu qui se met à la portée des hommes, qui se rend accessible, qui permet aux hommes d’avoir un accès à lui. En demandant une résidence au milieu de son peuple, Dieu se fait accessible. Didier a déjà souligné ce point en parlant de l’architecture du Tabernacle dimanche passé. Le premier objet que l’on trouve devant soi en entrant dans le Temple, comme dans le Tabernacle, c’est l’autel des sacrifices. Lieu de passage obligatoire, lieu de l’acceptation par Dieu, lieu de la réconciliation entre Dieu et les hommes, lieu de la grâce. Voilà donc ce qu’est le Temple : un lieu de paix, paix entre Dieu et nous. Cette symbolique est très forte puisque, lors de la construction du second temple, moins beau que le premier, Dieu annoncera, par la bouche du prophète Aggée, que ce second temple aura une gloire plus grande que le premier car, dit-il, "c’est en ce lieu que je donnerai la paix ". Et bien plus tard Jésus entrera dans ce temple disant : "Je vous donne ma paix, je ne la donne pas comme le monde la donne ". Et chassant les vendeurs pour démontrer la nature de cette paix.

C’est donc à un homme de paix que Dieu va demander de construire sa maison sur terre. Ce sera Salomon. David n’en est pas pour autant diminué ou déclaré incompétent : il avait un autre rôle à jouer, c’est tout. Il ne se sentira pas non plus déchargé de tout souci à ce sujet puisqu’il rassemblera les matériaux nécessaires à cette construction.

Cela peut nous conduire à quelques applications pour nous aujourd’hui. Le Temple de Dieu, aujourd’hui, c’est l’Église. Aujourd’hui encore pour construire la maison de Dieu il faut être un homme de paix. Si nous voulons édifier l’Église il faut le faire dans la paix. Sept fois, Dieu va déclarer que David ne peut pas construire le temple parce que c’est un homme de guerre, combien cela devrait spirituellement nous amener à réfléchir sur les conflits, les disputes et les querelles qui peuvent détruire et nous disqualifier dans l’œuvre de Dieu. Un homme colérique, un homme qui provoque les conflits n’est pas un homme apte à œuvrer à l’édification de la maison de Dieu.

Cependant méfions-nous de ne pas faire de la paix un absolu dévaluer. Il y a des paix à bon marché qui sont pires que toutes les guerres. La paix que Dieu veut donner est précise, définie, particulière. Ce n’est pas la paix qui ne fait pas de reproche, qui dit que tout est bon pour éviter tous les conflits. Ce n’est pas la paix indifférente du "Fiche-moi la paix ", ce n’est pas la paix de celui qui crie "Paix, paix, paix" et qui ne fait rien pour éviter la ruine présente. La paix de Dieu passe par notre repentance, elle passe par la reconnaissance de notre péché, elle passe par l’autel à l’entrée du Temple, elle passe par la croix de Jésus-Christ. Dieu veut vivre en paix avec les hommes mais pas en fermant les yeux. La paix dont Dieu nous parle est avant tout un traitement de ce qui a causé la guerre. Dieu veut d’abord la paix avec nous en nous réconciliant avec lui par Jésus-Christ, il veut ensuite que cette paix soit la marque de fabrique de nos relations en Eglise. Cette paix est certes obtenue difficilement car il nous faut parler de l’offense, la reconnaître, la traiter et enfin nous réconcilier. Mais l’Église ne sera Temple de Dieu qu’à ce prix. C’est parce que nous sommes en paix avec Dieu que nous pouvons vivre de la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence.

Ce fruit de l’Esprit est à la base de nos relations dans l’Église, donc à la base de la construction du Temple de Dieu dans la nouvelle alliance.

 

2- Lieu central de la vie du peuple de Dieu

Ce lieu de paix qu’est le Temple est ainsi devenu le lieu central de la vie du peuple d'Israël deuxième caractéristique. Lorsqu’on monte à Jérusalem, on ne monte pas au palais du roi, on monte au Temple de Dieu. C’est autour du Temple que le peuple se structure, se rassemble, vit. Et lorsque le Temple disparaît, c’est que le peuple n’a plus d’existence politique, c’est qu’il est disséminé, c’est qu’il est en exil, détruit. Le Temple est le lieu central, le point focal, le centre existentiel du peuple. Le lieu, Jérusalem et la colline du Temple, a d’ailleurs été choisi volontairement pour mettre le Temple en évidence. Cette emphase sur le Temple souligne les priorités que Dieu veut nous voir prendre dans notre vie. La priorité du peuple d'Israël ne devait pas être la pérennité de ses instituions politiques, ni la sûreté de ses frontières, ni la performance de son agriculture mais l’état de sa relation avec Dieu. Le temple, en tant que lieu focal, lieu de rassemblement du peuple pour toutes ses fêtes, mais aussi et surtout lieu de la symbolique de la présence de Dieu, soulignent que l’essentiel de la vie du peuple de Dieu est sa relation avec son Dieu.

Quel enseignement pour nous ! Le centre de notre vie doit être l’état de notre relation avec Dieu. Nous devons soigner cette relation, en prendre soin par une vie spirituelle régulière. Mais aujourd’hui, le Temple, le lieu concret de vie, le point focal de la vie du peuple de Dieu, c’est l’Église, non pas l’Église bâtiment mais l’Église corps de Christ. Un chrétien qui vit sans Église, ou en marge de l’Église, est donc un chrétien en exil, un chrétien qui ne peut donner la pleine mesure de ce qu’il est, un chrétien qui, de fait, vivra sa relation avec Dieu de manière incomplète. L’Église doit donc, comme le Temple dans la vie du peuple d'Israël être au centre de notre vie spirituelle et notre vie spirituelle au centre de notre vie. Pourquoi ? Parce que la qualité des autres domaines de notre existence dépend de l’équilibre et de la qualité de notre vie spirituelle. C’est pourquoi, troisièmement:

 

3- Le Temple sans la présence de Dieu est une boîte vide.

Cet enseignement n’est pas qu’un enseignement du Nouveau Testament. Déjà dans l’ancienne alliance, Dieu fait tout ce qu’il faut pour que le peuple comprenne que le Temple n’est qu’un symbole et que, comme tous les symboles, si la réalité représentée n’est plus là, le symbole ne vaut plus rien. C’est pourquoi le Temple sera détruit, c’est pourquoi la gloire de Dieu peut quitter le Temple, c’est pourquoi le prophète Amos, encore lui, pourra écrire que Dieu hait les sacrifices du peuple et ses cantiques mais qu’il attend un cœur pur prêt à le servir. Sans la vérité qu’il représente, un symbole est vide et ne vaut rien.

Un temple terrestre ne sera donc jamais qu’une image, voire un symbole, auquel Dieu n’est pas lié. C’est pourquoi Ezéchiel verra la gloire de Dieu se retirer du temple de Jérusalem. La réalité est spirituelle et si le matériel ne témoigne plus du spirituel, la réalité n’est pas liée au matériel. Quand le péché et l’idolâtrie sont à leur comble, même le temple de Jérusalem n’est qu’une boîte vide. La communion promise par l’alliance est brisée lorsque la rupture de l’alliance par le peuple est devenue irréversible. La gloire de Dieu est partie, Ezéchiel l’a vue s’en aller. Et pendant 400 ans le temple va tenir debout par la grâce de Dieu mais comme une belle maison vide. Israël attend le retour de la gloire de Dieu... et vient l’homme de douleurs. Soudain, pour quelques courts instants, la maison accueille son Seigneur. Un bébé de huit jours, un enfant de 12 ans, un homme. Soudain.., et déjà une croix se profile à l’horizon. Et le voile du temple se déchirera! Mais qui comprend qu’ainsi la demeure terrestre ressemble mieux - et non pas moins — à la réalité, que le symbole parle de nouveau, qu’il n’est plus une boîte vide? Le voile, lui, a perdu son sens. Le Temple même a perdu son sens. Dieu a changé d’alliance et de demeure. A peine 40 ans et le second temple sera lui aussi en ruine. Dieu est-il donc sans demeure ici-bas? Non, la destruction de la demeure glorieuse n’est que le signe évident que l’alliance ancienne est devenue caduque. Mais Dieu n’est pas menteur. Les promesses se sont accomplies à la lettre. Une nouvelle alliance, conclue dans le sang de l’agneau de Dieu, prend la place de l’ancienne alliance. Une nouvellecommunion l’accompagne. Le ciel n’a plus besoin d’ombre. La réalité est descendue sur terre. La croix est l’entrée dans ce nouveau tabernacle qu’est l’Église du Dieu vivant. L’Église est la nouvelle Jérusalem... en construction. Mais alors, l’Église ne doit surtout pas oublier ses modèles. Quand la réalité s’estompe parce que l’Église est pour le moment exprimée dans la faiblesse humaine, le modèle du tabernacle et du temple peuvent nous aider à retrouver I’ original que nous devons incarner. Retenons donc que nos bâtiments ne sont que des boîtes vides si la priorité n'est pas laissée au spirituel. Aujourd’hui la maison de Dieu, son Temple, c’est l’ensemble des chrétiens. Si nous n’habitons pas spirituellement un lieu de culte, s’il n’est pas un lieu de communion avec Dieu et avec les autres chrétiens, s’il n’est pas habité de pierres vivantes animées par la générosité et l’engagement de l’amour, il est aussi triste et inutile que ces cathédrales devenues lieu de tourisme et qui ont perdu leur âme.

Alors en construisant un bâtiment, n’oublions pas de construire l’Église de Dieu. Que ce nouveau bâtiment qui nous attend à la chaussée d’Alsemberg puisse être un lieu de paix, symbole de la gloire de Dieu parmi les hommes et habité par une communauté qui vit réellement une relation dynamique et tonifiante avec son Dieu. C’est pour cela que Jésus est venu sur terre.

 C’est cela la visée, le but de Noël.

 

Pasteur Philippe LAURENT.   pfrlaurent@hotmail.com

 

 

     Retour au menu du site