Introduction à l’apologétique : résumé des thèses fondamentales d’Alister McGrath « Jeter des ponts », ed. Excelsis –1999

 

Introduction

    Nous sommes la dernière génération de chrétiens avant la mort de l’Église. Cela est vrai si nous n’évangélisons pas. La bonne volonté ne manque pas mais, très souvent nous nous sentons mal équipés pour justifier de façon responsable et sérieuse les principaux thèmes de la foi chrétienne. L’apologétique tente de conférer à l’évangélisation intégrité intellectuelle et profondeur, en enracinant la foi aussi bien dans la tête que dans le cœur. Car la foi chrétienne n’est pas seulement une affaire de sentiments ou d’émotions ; elle concerne aussi des convictions, des dogmes. Croire en Jésus-Christ ne se limite pas à l’aimer, à l’adorer et à lui faire confiance. C’est également accepter certaines vérités définies le concernant et qui au départ servent de support à l’amour, à l’adoration et à la confiance qui lui sont vouées. La foi en Dieu est indissociablement liée à des doctrines relatives à Dieu. Le but essentiel de l’apologétique chrétienne est de créer un climat faisant appel à l’intellect et à l’imagination qui soit favorable à la naissance et au développement de la foi dans toute sa plénitude et sa richesse. L’apologétique classique s’est attachée à démontrer que le christianisme est rationnel. Certes, cet apport est intéressant et doit être conservé mais il doit aussi être enrichi. Le christianisme doit démontrer qu’il répond aux exigences de la vie et pas seulement à celles de la logique. L’apologétique est plus qu’une démonstration rationnelle de l’attrait du christianisme. Quel intérêt y a-t-il à démontrer le caractère attrayant du christianisme si cette démarche n’est pas accompagnée d’une réflexion pour comprendre pourquoi, de toute évidence, il n’attire pas davantage les gens ? Il nous faut donc savoir écouter nos interlocuteurs et savoir à quelle sorte de raisonnement nous avons à faire. Il nous faut donc repenser notre défense de la foi en fonction des besoins nouveaux et des possibilités nouvelles de notre temps.

    Mais attention aux recettes miracles ! L’apologétique et les pistes que cet exposé ouvrira ne sont que des moyens. Il appartient au chrétien de les appliquer correctement et intelligemment aux êtres de chair et d’os qui vivent dans un monde réel. Sans cela, l’apologétique reste théorie qui flotte dans l’air. Sachons bien que l’apologétique ne cherche pas à gagner de nouveaux arguments mais de nouveaux êtres humains.

    Le véritable apologiste écoute avant de parler et déploie tous ses efforts pour adapter le contenu de l’apologétique chrétienne traditionnelle aussi bien aux besoins de son interlocuteur qu’à sa capacité de comprendre l’argumentation et le langage figuré. L’apologétique est un art difficile qui exige à la fois une bonne connaissance de la tradition chrétienne, une grande faculté d’écoute bienveillante et une volonté d’exprimer des idées avec un fond et une forme dont le vis-à-vis tirera le plus grand profit. Travail ardu, sans doute, mais le résultat justifie cet investissement. Nous allons donc tenter ici de défricher quelque peu le terrain. Nous le ferons en deux temps : tout d’abord poser la théorie, ensuite tenter quelques pistes pratiques.

 

Les fondements théologiques de l’apologétique

    Une apologétique chrétienne efficace cherche à localiser les points où il existe une séparation entre l’évangile d’une part, les individus et les groupes humains dans le monde d’autre part. Elle recherche également les meilleurs endroits pour construire un pont de manière à établir un contact. La nature et la localisation du fossé varient d’une culture à l’autre et d’un individu à l’autre, tout comme le point d’ancrage du pont à construire et sa nature. Mais nous découvrons avec émerveillement que Dieu a déjà posé les fondations de ce pont dans le monde et dans le cœur humain ; il nous reste à construire dessus et à faire en sorte que les deux parties du pont en construction se rejoignent.

 

L’apologétique repose sur les doctrines de la création et de la rédemption

    La première grande découverte que nous faisons à la lecture de la Bible est que Dieu a créé le monde. Est-il alors surprenant que cette création lui rende témoignage ? Ou que l’être humain porte l’empreinte reconnaissable de son créateur ? Et que cette signature revête une importance considérable comme point de départ pour l’apologétique ? L’apôtre Paul y croyait fermement (Romains 1-2). Le témoignage rendu à Dieu par la création peut servir de déclencheur et inciter les hommes à poser des questions concernant le sens de la vie ou la réalité de Dieu. Ces points de contacts ont été posés par Dieu et ils doivent être exploités. Par la grâce de Dieu, la création est capable de révéler son créateur. Toutefois, avant d’aller plus loin, il faut préciser qu’en soi, ces points de contacts ne font pas entrer dans le royaume de Dieu. Ils ne sont que les points de départ de ce chemin. Ils peuvent tout au plus faire admettre l’existence d’un Être suprême créateur et bienveillant. Il restera ensuite à identifier cet Être au « Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ ». Tout au plus, la nature nous conduit-elle à une position théiste mais elle ne peut remplacer la révélation divine. La nature est un catalyseur et non un substitut à la révélation de Dieu. Elle prépare le terrain.

    En effet, selon la Bible, la nature humaine telle que nous la voyons et la connaissons maintenant n’est pas celle que Dieu avait voulue à l’époque. L’image de Dieu en nous est abîmée mais non détruite. Nous avons été créés pour vivre dans la présence de Dieu, mais à cause du péché, cette présence n’est plus qu’un rêve lointain. Ce qui aurait dû être rempli de la connaissance, de la gloire et de la présence divine est au contraire vide et insatisfait.

    C’est là qu’intervient la dialectique entre les doctrines de la création et de la rédemption sur laquelle repose la défense de la foi chrétienne. La création a établi un potentiel que le péché a détruit, mais la blessure et la souffrance de cette rupture restent vives dans notre vécu quotidien. C’est ce sentiment de manque, d’incomplétude, qui sous-tend l’aspiration à un point de contact. La conscience de ce vide est la plus forte chez ceux qui sont arrivés au sommet. Jack Higgins, auteur de roman noir au sommet de son art et de la notoriété, interrogé sur ce qu’il savait maintenant et qu’il aurait aimé savoir étant jeune, aurait répondu : « Que lorsqu’on arrive au sommet, il n’y a rien ». Nous connaissons tous ces gens qui au sommet de la gloire, de la notoriété, de la réussite professionnelle, se suicident. La plupart des gens sentent bien qu’il leur manque quelque chose, même s’ils ne sont pas toujours capables de mettre un nom dessus. L’Évangile interprète ce sentiment de nostalgie et d’incomplétude comme l’aveu de l’absence de Dieu, et il peut proposer de remplir ce vide. Une fois que nous nous découvrons incomplets, que quelque chose nous manque, nous pouvons alors nous demander s’il n’y a pas moyen de combler ce vide spirituel.

    Augustin disait : « Tu nous as faits pour toi, et notre cœur est sans repos jusqu’à tant qu’il repose en toi. » Pascal écrivait : « Il y a dans le cœur de l’homme un vide qui a la forme de Dieu. » Il est un souvenir latent de Dieu, accentué par une rencontre avec la création qui a la faculté de pointer le doigt vers la source capable de satisfaire l’aspiration humaine.

    Il nous faut cependant limiter ces affirmations par trois dangers qui nous guettent dans le désir d’être convaincants.

    Il existe une limite à ce que la raison humaine peut appréhender de Dieu par l’observation de la nature. Nous devons tenir compte des limitations de notre connaissance naturelle de Dieu, à cause du péché. A cause du péché de l’homme, il ne faudrait pas prétendre que tout ce que nous savons de Dieu par la nature est tout ce qui peut être connu de lui. Cela conduirait rapidement à idolâtrer la nature, la création, au lieu du créateur. Le péché s’accompagne d’un penchant à la distorsion qui fait que la révélation de Dieu dans la création est facilement changée en une idole de notre propre fabrication. Le caractère égocentrique du péché humain, enraciné dans la volonté déchue, se manifeste par le désir mortel de l’humanité corrompue de créer Dieu à sa propre image et à sa ressemblance, au lieu d’accepter par obéissance la révélation que Dieu a donnée de lui-même. Il existe donc une fracture à l’intérieur de la création. La nature humaine déchue est obligée de réfléchir sur une création déchue, ce qui introduit une double distorsion. En effet, non seulement l’œil qui observe est faussé mais aussi l’objet observé. Cela ne signifie pas qu’aucune connaissance de Dieu ne soit accessible à l’homme, ou que celui-ci ne puisse avoir aucun sentiment de sa présence. C’est simplement reconnaître que cette connaissance est imparfaite. La connaissance naturelle de Dieu est donc une connaissance distordue, car tout ce qui révèle moins que l’image complète est forcément une représentation déformée. La démarche n’en demeure pas moins valable comme point de départ.

    La création, tous les êtres humains y compris, est finie, tandis que Dieu est infini. Comment l’infini pourrait-il être dévoilé par le fini ? Comment une créature faible et finie pourrait-elle saisir le créateur ? La meilleure réponse est celle du principe de l’analogie. En créant le monde, Dieu imprime sa trace sur lui. De même qu’un artiste signe son tableau pour bien montrer qu’il en est l’auteur, Dieu a laissé l’empreinte de sa nature sur l’ordre créé. C’est un moyen d’expression de Dieu. Cela ne signifie pas que la nature soit Dieu ou que créateur et création soient une même et seule chose. Nous ne pouvons parler que d’allusions, d’indices, de rumeurs, de poteaux indicateurs, de choses qui pointent vers Dieu mais qui ne sont pas elles-mêmes Dieu.

    Mal comprise, cette théologie pourrait faire croire que l’initiative vient de l’humanité déchue, comme un effort pour chercher Dieu, et non du Dieu qui se révèle et rachète. Pour éviter cet écueil, il faut rappeler que la vraie connaissance de Dieu ne peut procéder que d’une révélation, intervention de Dieu lui-même agissant en pleine liberté et décidant souverainement. Mais Dieu, dans sa miséricorde, a envoyé des signes annonciateurs et laissé entrevoir des ombres de cette connaissance salvatrice dans le monde. La connaissance naturelle de Dieu accomplit son dessein lorsqu’elle indique à la fois la nécessité et la possibilité d’une connaissance divine plus complète que celle entrevue par les traces de Dieu dans l’ordre naturel. En revanche, cette connaissance naturelle se comporte en traître si elle se présente comme connaissance de Dieu dans sa plénitude. L’exemple le plus frappant d’une révélation naturelle qui a fonctionné est cet homme du Mali qui, rencontrant pour la première fois un missionnaire chrétien lui a dit : « Enfin, depuis le temps que j’attendais quelqu’un qui m’apprenne tout ce que je ne sais pas sur le Dieu qui se révèle dans la nature ».

 

L’apologétique repose sur la capacité de Dieu de se révéler par le moyen du langage humain

    Tout ce que nous venons de découvrir, il faut le dire. C’est dans le champ de la nature et du créé qu’il faut aussi situer le langage humain. Nous pouvons donc avoir une approche de celui-ci qui est quelque peu semblable à celle de la nature : quelque fragmentaires et incomplets que puissent être les mots humains, ils sont cependant le moyen par lequel Dieu a choisi de se faire connaître.

 

    L’apologétique peut se servir de mots qui agiront comme des indicateurs pour le profit de ceux qui doivent encore découvrir ce que c’est que de faire l’expérience de Dieu. Elle se sert d’un ensemble de mots clés pour tenter d’expliquer ce que c’est que de connaître Dieu, en établissant un lien de parenté avec des mots qui interviennent dans l’expérience humaine. Prenons l’idée du pardon. Si vous arrivez à vous imaginer ce que peut être le pardon réel accordé pour une offense grave, vous êtes sur le point de comprendre la portée du pardon chrétien. Il en est de même de l’idée de réconciliation avec une personne qui vous est très chère, vous aurez une petite idée de ce qu’est le retour de l’homme pécheur vers Dieu. C’est comme rentrer à la maison après avoir erré longtemps seul, ayant peut-être perdu tout espoir de pouvoir revenir.

    Comment l’apologétique peut-elle se servir de mot ainsi ? N’y a-t-il pas un certain arbitraire dans cette façon de procéder ? De quel droit pouvons-nous nous appuyer sur l’expérience humaine de la réconciliation pour oser ensuite affirmer qu’elle est en quelque sorte un écho de la réconciliation avec Dieu ?

    C’est là que la doctrine chrétienne de la création vient au secours de nos affirmations théologiques. L’analogie existe, elle n’a pas à être inventée. Elle existe pour ainsi dire dans l’ordre naturel des choses. Parler de rédemption, de pardon, de réconciliation ou de libération, c’est vraiment évoquer des situations concrètes au sein du monde des hommes. C’est aussi, par la grâce de Dieu, affirmer l’irruption de Dieu dans le monde qu’il a créé, et sa faculté de se communiquer dans nos mots. Celui qui était riche au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer s’est fait pauvre pour nous ; en acceptant que des mots humains soient des signes qui pointent vers lui, il fait preuve de cette même volonté et faculté de s’abaisser. La grâce transfigure le caractère ordinaire des mots humains.

    L’apologie ne s’appuie donc pas sur une verbosité qui invente de nouveaux mots pour parler de Dieu, mais sur la grâce de Dieu qui accepte les mots anciens dans un sens nouveau. La médiocrité de nos mots est transfigurée par la grâce, et leur pauvreté se transforme en puissance par la présence et le vouloir du Saint-Esprit. Parole et Esprit sont associés dans l’effort divin final pour convaincre l’homme ; l’Esprit applique les mots de l’Ecriture à notre esprit et à notre cas, et fait naître la foi de ce qui a été compris. Pour reprendre les termes mêmes du Petit Catéchisme de Westminster, « la vocation chrétienne est l’œuvre de l’Esprit de Dieu qui nous convainc de notre péché et de notre misère, illumine notre esprit par la connaissance du Christ et nous rend capables d’accepter Jésus-Christ qui nous est librement offert dans l’Évangile. »

    Qu’il nous soit cependant encore permis de rappeler ici que la révélation naturelle, si elle est accessible à tous les hommes, n’est pas suffisante pour donner un portrait complet de la nature, les attributs et les intentions de Dieu. La révélation biblique est indispensable car non seulement elle répète ce que l’homme peut déjà connaître de Dieu par la nature, mais elle clarifie cette révélation générale et l’augmente. C’est uniquement par l’Ecriture que le croyant a accès à la connaissance des actes rédempteurs de Dieu dans l’histoire, ces actes qui culminent dans la vie, la mort et la résurrection de Jésus-Christ. La connaissance de Dieu le sauveur ne se trouve qu’en Jésus-Christ, dans l’Ecriture. La nature oriente vers l’Ecriture, comme l’Ecriture oriente vers Christ. Une cascade de témoins nous permet de remonter de la création jusqu’au créateur, et ainsi jusqu’au rédempteur.

    Le langage humain est un outil valable et accepté par Dieu pour aider à faire ce trajet. Prenons un exemple. Une personne souffre d’un profond sentiment de culpabilité morale qui l’empêche de s’approcher de Dieu. Présentons, par nos paroles, la croix comme un tribunal où Christ a obtenu le pardon et l’acquittement du pécheur. Ceux qui sont coupables peuvent donc être purifiés de leurs péchés et justifiés aux yeux de Dieu. Ils sont exempts du châtiment et reçoivent le statut de justes devant Dieu. Nous ne présentons-là qu’une des composantes du message de la croix mais elle est tout à fait appropriée à notre interlocuteur. L’annonce du pardon peut alors être entendue. Cela ne signifie pas que le message de la croix se résume à cela mais que si toutes les composantes du message de la croix sont valables et pertinentes pour la situation de l’homme, tous les individus n’ont pas les mêmes besoins ni la même sensibilité spirituelle. Un tel peut éprouver une grande crainte de mourir. Il faut que la présentation de l’Évangile soit « taillée à sa mesure », adaptée à sa situation. Cette personne sera peut-être sensible à l’annonce de la victoire de Christ sur la mort. L’Évangile a-t-il été réduit pour autant ? Non. Cette présentation s’efforce tout simplement de faire coïncider le langage de la présentation avec les besoins de l’interlocuteur. C’est la recherche du point de contact pour l’Évangile. C’est un cheval de Troie qui entre dans la place forte de l’incrédulité avant d’ouvrir toutes grandes ses portes à la pleine manifestation de l’Évangile. Le reste suivra en son temps. Il est donc essentiel de bien comprendre l’Évangile pour pouvoir le présenter de manière diverse et adaptée à l’interlocuteur qu’il faut avoir pris le temps de connaître également.

    Il ne faut donc pas oublier qu’un témoignage efficace s’appuie sur une bonne connaissance de son interlocuteur. Celui-ci n’est ni statique ni prévisible, ni toujours le même quels que soient l’âge, la situation sociale, le pays d’origine ou la langue maternelle. Regardez Jésus. Les paraboles sont en langage ordinaire, utilisant des situations connues, parlant de choses compréhensibles. En apportant le message de l’Évangile simplement. L’exemple du fils prodigue est un bon exemple. Cette situation était connue de plusieurs et prévue par la loi. Par contre ce qui est surprenant et interpellant, c’est que le Père court à la rencontre de son fils qui revient. Un homme important et d’un certain âge ne courait pas, c’était s’abaisser. Et, dans cette situation banale, en répondant à un besoin, Jésus introduit la rupture de l’Évangile.

    Retenons donc que le langage ordinaire a été jugé digne par le Seigneur de communiquer la grâce ; Dieu lui a reconnu la faculté de transmettre la révélation de sa personne. Que notre langage de tous les jours fasse de même. Pour cela dépouillons-le de l’ambiguïté, et enracinons-le dans l’Ecriture que Dieu a donnée. Evitons de donner l’impression de parler avec un vocabulaire religieux archaïque, ou un ensemble de symboles mystiques ou un langage ésotérique incompréhensible à tous sauf aux rares initiés.

    Le langage va donc nous permettre de construire des ponts entre l’Évangile et notre interlocuteur. Sans être réducteur, peut-on avoir à l’esprit quelques pistes préalables à toute rencontre ? C’est ce que je crois.

 

Les points de contacts avec nos contemporains

    Après avoir posés les fondements théoriques comme nous venons de le faire, cette deuxième partie de l’exposé sera peut-être plus pratique et donc plus accessible puisque je vais tenter de vous montrer comment cette théorie peut se traduire dans les faits. Je vais donc mettre en évidence plusieurs points de contacts possibles pour échanger au sujet de la foi avec nos contemporains. Ne croyez surtout pas que je vous donne là des recettes. Il s’agira bien de pistes à creuser et à adapter à chaque auditeur.

Un profond sentiment d’insatisfaction

    Le premier point de contact me semble être ce profond sentiment d’insatisfaction commun à tous les hommes. Avez-vous déjà remarqué ce qui se passe lorsque vous désirez ardemment une chose et que vous l’obtenez ? Par exemple un nouvel emploi. Ou un conjoint. Des titres enviables. Une augmentation de salaire. Vous commencez par en avoir fortement envie. « Lorsque je l’aurai, je serai satisfait et ne demanderai rien de plus. » En réalité, les choses ne se déroulent pas ainsi. Lorsque vous avez obtenu ce que votre cœur désirait, vous n’en éprouvez pas la satisfaction escomptée. Vous voulez davantage. Vous voulez autre chose. Le dicton « l’espoir fait vivre » souligne cet état de choses. Le paradoxe de l’hédonisme, qui veut que le plaisir soit autodestructeur, confirme cette observation. Il semble bien que rien de fini ne puisse étancher une soif intense en nous. Mais d’où peut bien venir cette soif ? Et existe-t-il un moyen de l’assouvir ? Comment se fait-il que quelqu’un comme Rockefeller, interrogé sur le point de savoir s’il était heureux, ait répondu « Non ». Et quand on lui a demandé ce qu’il lui fallait pour être heureux, ait répondu : « Plus ». Plaisir, beauté, amitiés : tout cela est si prometteur ! Pourtant, dès que nous en jouissons, dès que nous croyons avoir mis la main dessus, nous découvrons tous que ce que nous cherchions ne se trouvait pas en eux, mais au-delà. Même dans notre contentement, nous ressentons confusément qu’il manque quelque chose. Oui, l’existence humaine ne peut se défaire d’une insatisfaction qui pousse l’homme à se demander s’il y a vraiment quelque chose qui soit capable d’étancher complètement la soif de son cœur.

    Ce sentiment général d’insatisfaction, bien attesté partout, est l’un des plus importants points de contact pour la proclamation de l’Évangile. D’après la doctrine chrétienne de la création, nous avons été faits à l’image de Dieu. Nous avons donc une faculté innée, nous devrions même dire un besoin inné de communiquer avec Dieu. Omettre ou négliger de nouer des relations avec Dieu, c’est ne pas pleinement répondre à sa vocation d’homme. Pour être comblé, l’homme doit être rempli par Dieu. Rien de transitoire ou d’éphémère ne pourra jamais combler ce besoin. Rien de ce qui n’est pas Dieu ne pourra jamais prendre la place de Dieu. Pourtant, à cause de la déchéance de la nature humaine, l’homme est naturellement enclin à combler ce besoin par d’autres choses. Le péché nous éloigne de Dieu et nous suggère de mettre autre chose à la place laissée vacante par l’absence de Dieu. Des choses créées se substituent à Dieu. Il va de soi qu’elles ne peuvent satisfaire l’être humain. La plus belle expression de ce sentiment et son interprétation théologique la plus exquise se trouvent peut-être dans cette parole de saint Augustin : « Tu nous a faits pour toi et notre cœur est sans repos jusqu’à ce qu’il repose en toi ». Le désir humain, cette soif douce et amère à la fois d’une réalité qui nous satisfera, va au-delà d’objets finis ou d’individus précis (qui semblent pourtant capables de combler ce désir, mais se révèlent en définitive totalement incapables de le faire) ; à travers ces objets ou ces individus, il pointe vers son but réel et son objectif en Dieu lui-même. C’est comme si l’amour humain se portait sur quelque chose de plus lointain que lui-même, comme une parabole.

    La faim physique d’un homme ne prouve pas qu’il recevra du pain ; s’il se trouve sur un radeau au beau milieu de l’Atlantique, il a toutes les chances de mourir de faim. Mais elle prouve que l’homme en question appartient à une race qui renouvelle ses forces en mangeant et qui habite dans un monde où il existe des aliments comestibles. Ainsi, même si je ne crois pas que mon soupir après le paradis prouve que j’y entrerai un jour, je pense qu’il est une indication valable qu’une telle réalité existe et que certains y entreront. Un homme peut aimer une femme et ne jamais vivre cet amour mais il serait tout de même curieux que le phénomène appelé « coup de foudre » se produise dans un monde asexué.

    Toute cette réflexion va dans le sens de ce célèbre verset des psaumes : « Comme une biche soupire après l’eau des ruisseaux, de même je soupire après toi, ô mon Dieu. J’ai soif de Dieu, du Dieu vivant ! » (Psaume 42.2-3).

    Le point de contact peut donc être créé, à vous de l’exploiter.

 

L’agencement du monde

    Une des découvertes les plus significatives de la science moderne a été sa démonstration de l’ordre qui règne dans le monde. La science a mis en évidence une structure intelligible et délicatement équilibrée, obligeant l’homme à se poser des questions qui ne sont plus du ressort du scientifique et suscitant une agitation des milieux intellectuels qui cherchent une explication adéquate. L’instinct humain fondamental qui tend à discerner l’ordre dans le monde, instinct clairement mis à l’œuvre dans la littérature sapientiale de l’Ancien Testament, se trouve conforté par les découvertes de la physique qui présentent un cosmos étonnamment ordonné. En même temps, elles suscitent des questions qui peuvent se résumer en un seul mot : pourquoi ?

    La question centrale qu’il faut considérer est la suivante : d’où le monde tient-il son agencement ? On pourrait répondre qu’il n’existe aucun ordre dans le monde, en dehors de celui que l’homme lui impose. Cette idée est une construction de l’esprit humain et ne repose sur aucune base réelle solide. Aussi séduisante que puisse paraître cette opinion au début, elle ne s’appuie que sur une série d’improbabilités historiques. Fois après fois, l’évidence imperturbable qui a pu être observée a porté un coup fatal aux théories simples et ordonnées d’êtres humains. L’agencement que l’esprit humain essaie d’imposer au monde se montre incapable de l’expliquer, et pousse l’homme à rechercher une meilleure explication. L’agencement imposé par l’homme est donc toujours comparé à celui révélé dans le monde, afin d’y apporter les corrections nécessaires.

    La science révèle donc un monde qui possède une structure interne aux multiples nœuds, une structure en quête d’explication. Or, paradoxalement, la science est incapable de répondre aux questions qui se posent, alors même que ses réponses apparaîtraient comme la contribution scientifique essentielle à la compréhension du monde.

    Supposons qu’un même créateur ait façonné à la fois le monde et l’esprit humain. N’aurions-nous pas raison de nous attendre à ce qu’ils correspondent ? Qu’il y ait une convergence de rationalité ? Que le monde laisse percevoir des traces de l’agencement divin, et que l’esprit humain soit capable de discerner cet arrangement et d’en saisir la portée ? Voilà une question percutante adressée à ceux qui, justement, rejettent l’idée de Dieu pour des considérations scientifiques.

    Ce qui se cache derrière l’univers s’identifierait plus à un esprit qu’à toute autre chose que nous connaissons. Autrement dit, ce quelque chose serait un être conscient, ayant des buts déterminés et une préférence pour telle chose plutôt que telle autre… Cet esprit aurait créé l’univers, en partie pour des raisons que nous ignorons, mais en partie, en tout cas, pour produire des créatures à son image, c’est-à-dire pourvues d’un esprit semblable à celui de leur créateur.

 

Le sens moral humain

    La plupart des gens ont le sens du devoir moral ; ils éprouvent le besoin de se mettre d’accord sur une certaine morale. Voilà un point de contact bien intéressant. Prenons un exemple banal. Les gens se querellent et, tous les jours, utilisent des phrases comme : « Aimeriez-vous que l’on agisse de même à votre égard ? » « Laissez-le tranquille, il ne vous a rien fait » « C’est ma chaise, j’y étais assis avant toi. » En se disputant ainsi, ils font inconsciemment appel à des normes morales. Les désaccords moraux surgissent pour empêcher que ne soit abandonnée l’idée de vérité morale. Lorsque des personnes ne sont pas d’accord sur des questions morales, elles se comportent comme s’il existait un accord sous-jacent à propos de ce qui est bien et mal. Il semble en fait que les deux parties aient à l’esprit quelque sorte de loi ou de règle de fair-play, d’attitude décente, de morale, ou tout ce que vous voulez, sur laquelle ils se basent. Et c’est bien vrai. Si ce n’était pas le cas, ils auraient beau se battre comme des bêtes, ils ne pourraient pas se quereller au sens humain du terme, qui consiste à prouver que l’autre a tort. Il n’y aurait aucun sens à agir de la sorte sans que l’un et l’autre ne soient à peu près d’accord sur la notion du Bien et du Mal ; tout comme il n’y aurait aucun sens à sanctionner la faute d’un joueur de football, sans qu’il n’y ait un accord préalablement établi sur les règles à observer.

    On constate évidemment des différences appréciables entre les nombreuses perceptions de ce qui est bien ou mal. Mais il faut souligner qu’il existe un ensemble de constances morales communes à toutes les civilisations humaines. Tout homme possède le sens du devoir moral. Tandis que les lois scientifiques décrivent les choses telles qu’elles sont, la loi morale indique comment les choses devraient être. Mais d’où vient cette morale ? Sur quelle base cette loi morale repose-t-elle ? La seule explication valable de cette morale réside en Dieu. Nous pouvons établir le syllogisme suivant :

    Si Dieu n’existe pas, il ne peut y avoir objectivement d’obligations morales.

    Or, maintenant, les hommes sont soumis à des obligations morales.

    Donc, Dieu existe.

    Cette approche a cependant ses détracteurs et il faut nous arrêter sur leur objection majeure. L’attaque séculière sur la référence à Dieu en matière de morale repose sur ce qu’on a appelé le « dilemme d’Eutyphron », mentionné pour la première fois dans le dialogue du même nom de Platon. Ce dilemme semble montrer que Dieu est totalement étranger à l’éthique. Il se présente généralement comme suit.

    « Une chose est-elle bonne parce que Dieu l’ordonne ou bien Dieu ordonne-t-il une chose parce qu’elle est bonne ? »

    Si la première hypothèse est correcte, la bonté devient quelque chose d’arbitraire qui dépend du caprice de Dieu. Si Dieu nous ordonnait de torturer l’innocent ou d’exterminer des races entières, l’action serait bonne, alors que, manifestement semble-t-il, elle est mauvaise. Et le fait que nous reconnaîtrions cette action comme mauvaise implique que la désignation d’une action comme bonne ou mauvaise dépendrait de nous et non de Dieu, ce qui finalement abandonne la définition du bien et du mal à la subjectivité individuelle ou de la majorité, ce qui, les deux guerres mondiales le prouvent, n’est pas le meilleur système.

    Si la deuxième hypothèse (Dieu ordonne une chose parce qu’elle est bonne) se révèle exacte, Dieu n’a rien à voir avec l’éthique, puisque le bien et le mal existeraient indépendamment de lui. Tout ce qu’il ferait serait de confirmer ce qui est déjà bien. Le moraliste n’a donc pas besoin de faire intervenir Dieu dans la discussion. On peut ignorer Dieu sans que cela ait la moindre incidence sur la morale.

    Ce dilemme est défait par la doctrine chrétienne de la création. Les êtres humains sont faits à l’image de Dieu. On peut donc espérer que les notions divines de justice et de droiture soient d’une certaine manière implantée en nous. De même que la création porte l’empreinte de son créateur, la nature humaine porte l’empreinte morale de Dieu. Notre idée de justice n’est pas arbitraire ; elle est en harmonie avec la nature de Dieu lui-même. Le dilemme d’Eutyphron tient debout si, et seulement si, les idées humaine et divine de justice ou de bonté sont deux entités totalement indépendantes. Mais la doctrine chrétienne de Dieu et de la création anéantit ce dilemme en insistant sur le fait qu’il existe un lien inné et indissoluble entre l’idée humaine et l’idée divine de la bonté, un lien qui subsiste même dans la nature humaine déchue. Nous reconnaissons que ce que Dieu fait est juste parce que nous avons été créés selon l’image divine de la justice. Les idées humaine et divine de la justice sont en phase. Dans le système chrétien, le dilemme d’Eutyphron est une impossibilité.

    Mais attention à ne pas aller trop loin. Le sens de contrainte morale n’oriente pas nécessairement vers Dieu, mais il est hautement suggestif. C’est un inestimable point de départ pour la discussion. Il ne prouve pas nécessairement quelque chose. Mais il suggère que l’existence de Dieu est l’explication la plus probable et la plus plausible de l’existence du devoir moral. Il en va de même pour ce que nous appelons l’angoisse existentielle.

4. L’angoisse existentielle

    Qu’est-ce que l’angoisse existentielle ? La littérature existentielle révèle la peur d’insignifiance profondément ancrée en l’homme qui découvre que la vie est absurde ou qui perd de vue la signification qu’elle possède. Nous connaissons alors l’angoisse de perdre notre chemin dans l’étendue immense d’un monde impersonnel et d’être réduit à un détail cosmique insignifiant. Ce sentiment reflète une peur profonde de n’avoir aucun sens ni aucun but, il reflète également l’absurdité ultime de la vie, peut-être même un réel désespoir devant les choses effrayantes qui menacent de nous réduire à rien d’autre qu’un numéro ou à un élément d’une série statistique, en fin de compte une statistique sur la mortalité. Ce sentiment est souvent très intense à l’approche de la cinquantaine. C’est ce que la psychologie appelle la « crise de milieu de vie » (CMV). Même si c’est un lieu commun de parler de sens de la vie, il ne faut pas oublier que cette expression cache parfois un désarroi existentiel.

 

    Cette anxiété est un précieux point de contact. Nous ne nous sentons pas en sécurité dans ce monde. Cette insécurité est un puissant stimulant pour chercher un abri sûr. Au lieu de demander, comme Luther : « Où trouver un Dieu miséricordieux ? », beaucoup se posent la question : « Où trouver la sécurité et le repos d’esprit ? » En fait, les deux questions reviennent au même. La première est formulée par un esprit pétri de théologie mais qui cherche cependant à rencontrer un Dieu de grâce ; la seconde émane d’une personne peu assurée qui manque de connaissance spirituelle et d’intuition théologique et que la question peut placer sur le chemin de la découverte d’un Dieu de grâce. L’apologiste a pour mission de faire correspondre l’Évangile à ce profond sentiment de malaise, sachant que l’Évangile explique ce vide et le comble par la présence du Dieu vivant. L’angoisse de l’homme est finalement due à l’absence de Dieu. Pour paraphraser Augustin, notre cœur est agité parce qu’il doit rechercher un lieu de repos, voire découvrir que le seul lieu qui offre un vrai repos est Dieu lui-même.

    Cette angoisse existentielle a comme ressort principal la peur de la mort. Celle-ci nous renvoie à notre finitude, autre point de contact.

 

5. La conscience de la finitude et du caractère mortel de l’homme.

    Un jour ou l’autre, la réalité de la mort nous saisit tous de façon personnelle. La mort n’est pas seulement ce qui arrive aux autres : elle m’atteindra aussi. Pour éluder cette perspective peut réjouissante, la société occidentale a en quelque sorte stérilisé, aseptisé la mort en l’enveloppant du langage du sommeil. Beaucoup d’euphémisme ont forgé une vision du monde dans laquelle la réalité crue de la mort est niée.

    Pourtant, la peur de la mort, souvent exprimée dans les termes de révolte et d’incapacité à s’accommoder de la fragilité et de la précarité de la vie humaine est bien inscrite chez tous les êtres humains. L’homme a dû mal à accepter le caractère mortel de sa nature. C’est ainsi que sont expliqués une bonne partie des suicides de jeunes : un grand sentiment de désespoir. N’est-il pas significatif que pour séduire l’humanité, l’ennemi ait faussement fait miroiter devant elle la garantie qu’elle ne connaîtrait pas la mort : « Vous ne mourrez pas… vous serez comme des dieux » (Genèse 3.5).

    Il est tellement plus réconfortant de penser que nous (et le monde) vivrons éternellement, que nous pourrons conserver toutes les médailles scintillantes gagnées durant notre vie. Mais la réalité est différente.

    La soif de quelque chose que la mort ne peut pas nous ravir, l’aspiration à l’immortalité, l’espoir d’arriver de l’autre côté de la tombe, sont des désirs étroitement liés aux doctrines chrétiennes de la création, de la chute et de la rédemption. Nous avons été créés pour la vie éternelle ; nous en avons été privés à cause du péché qui nous détourne de Dieu, créant ainsi un vide profond en nous. L’angoisse de la mort est un symptôme de ce vide. Elle est elle-même un signe qu’il existe une possibilité de reconstruction et d’épanouissement de notre être brisé par le péché. Dans le contexte des doctrines chrétiennes de la création, de la chute et de la rédemption, l’angoisse révèle notre déchéance et laisse entrevoir une rédemption possible. L’angoisse de la mort devient ainsi la porte d’accès à la vie éternelle. Elle nous contraint à nous poser des questions auxquelles l’Évangile apporte des réponses. La réalité physique de la mort agit comme une flèche indiquant la nécessité spirituelle de mourir à soi-même, d’être crucifié avec Christ et de ressusciter en nouveauté de vie avec lui. Le sentiment de peur qui assaille l’homme peut être considéré comme le résultat des légers coups frappés par Dieu à la porte de notre cœur pour nous rappeler que nous ne sommes que des locataires avec un bail de courte durée. Nous devons faire face à l’inévitable ; dans sa grâce, Dieu a permis que la crainte de la mort conduise à la vie éternelle. Sur l’ortie de l’anxiété humaine, nous pouvons cueillir la fleur de la paix divine.

 

Conclusion

    Il y aurait encore beaucoup à dire sur le sujet des points de contact. Nous pourrions en chercher d’autres. Ne perdons cependant pas de vue que la recherche des points de contact a pour but de susciter l’écoute de notre interlocuteur. Il faut donc d’abord le connaître et s’adapter à lui. Les points de contact sont alors un outil puissant mais rien d’autre. A aucun moment nous ne devons laisser entendre que ces arguments constitueraient des preuves irréfutables de l’existence de Dieu. Nous démontrons plutôt que la raison pointe dans la direction de Dieu et offre un appui à ceux qui croient déjà en lui. En aucun cas le christianisme n’est irrationnel : au contraire, son propre système de rationalité est parfaitement cohérent. Car la raison ne se contente pas seulement de pointer vers Dieu ! Lorsqu’elle a découvert Dieu – pour s’apercevoir alors que c’est Dieu qui l’a découverte en premier -, elle est transfigurée et devient centrée sur Dieu.

    C’est donc pour le chrétien le moment ou jamais de dire clairement que le christianisme offre justement ce que l’homme moderne désespère de trouver : l’unité de la pensée. Il offre une réponse homogène à tous les problèmes de la vie. Il faudra certes que l’homme abandonne son rationalisme, mais ce ne sera que pour se retrouver tel qu’il est, un être rationnel.

               Philippe Laurent

 

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